Voici un extrait du programme de BTS (excellente lecture les jours de pluie !) :
La loi de Poisson est introduite comme correspondant au nombre de réalisations observées, durant un intervalle de temps de longueur donnée, lorsque le temps d’attente entre deux réalisations est fourni par une loi exponentielle. La connaissance d’une expression explicite de la loi de Poisson n’est pas attendue. |
Ambitieux ! En fait, un processus est une variable aléatoire dépendant du temps, qui est donc plus abstrait qu’une « simple » variable aléatoire. Mais il se trouve qu’un processus de Poisson peut être vu sous deux angles différents :
- projeté sur l’axe des temps (entre deux gouttes de pluie ci-dessous), il mène à des variables aléatoires exponentielles ;
- projeté sur l’axe des fréquences (nombre de gouttes de pluie par seconde ci-dessous) il mène à des variables aléatoires de Poisson.
C’est assez similaire à ces exercices où on demande la forme d’un solide qui ressemble à un disque vu d’au-dessus et à un carré vu de côté (si, si ça existe, et c’est même au programme du collège)...
Pour voir un exemple de processus de Poisson (traité avec la loi exponentielle en Terminale et avec la loi de Poisson en BTS), voir cet article de volcanologie. Mais en attendant d’aller voir s’il y a une éruption volcanique, on ne peut qu’écouter la pluie qui tombe :
Pensées poissonniennes d'un jour de pluie
Remarque sur les fonctions graphiques de ce fichier: Le premier paramètre est un entier allant de 1 à 4; c'est
le numéro du graphique sur lequel on dessine l'histogramme ou le diagramme en bâtons. Le second
paramètre est un réel positif, c'est la valeur maximale de x
sur l'axe des abscisses.
Enfin le troisième paramètre est un tableau de nombres.
I/ Simulation de variables aléatoires exponentielles
Il va bientôt pleuvoir: Quelques gouttes tombent petit à petit, au hasard. On fait l'hypothèse qu'elles sont indépendantes entre elles, et que la probabilité que deux d'entre elles tombent exactement en même temps, est nulle. Alors, en notant λ le nombre moyen de gouttes de pluie par seconde, l'intervalle de temps entre deux gouttes est modélisé par une variable aléatoire exponentielle X de paramètre λ. Théoriquement parlant, cela signifie que la chute d'une goutte de pluie ne fait pas vieillir le nuage dont les gouttes tombent.
Alors, la fonction de répartition de X est 1-e-λx
ce qui veut dire que
- P(X<a)=1-e-λ×a (définition de la fonction de répartition)
- P(X≥a)=e-λ×a (passage à l'évènement contraire)
- P(-λ× X ≤ -λ× a)=e-λ×a (multiplication des deux membres par un nombre négatif)
- P(e-λ×X≤ e-λ×a)=e-λ×a (la fonction exponentielle est croissante)
En posant U=e-λ×X et x=e-λ×a, la dernière des probabilités ci-dessus s'écrit P(U≤x)=x, ce qui signifie que la fonction de répartition de U est égale à x; sa dérivée est la loi de U; on trouve x'=1, donc la loi de U est la constante égale à 1: U suit une loi uniforme sur ]0;1[.
Théorème: Si X suit une loi exponentielle de paramètre λ, e-λX suit une loi uniforme sur ]0;1[.On peut remonter les calculs, et donc si U est uniforme sur ]0;1[, -ln(U)/λ suit une loi exponentielle
de paramètre λ. Or on sait simuler une variable aléatoire uniforme sur ]0;1[ (en JavaScript c'est Math.random()
),
et l'algorithme suivant permet donc de simuler une variable aléatoire exponentielle:
Le caractère exponentiel de la distribution apparaît nettement sur l'histogramme. On peut essayer d'autres valeurs de λ et de N (mais ne pas oublier
de changer le second paramètre de la fonction histogramme
en bas du script).
II/ Fréquence des chutes de gouttes de pluie
Des météorologistes ont disposé un drôle d'appareil, qui fait penser à un compteur Geiger: À chaque fois qu'une goutte de pluie tombe sur une plaque métallique, un microphone enregistre un "plic" qui incrémente un compteur. À chaque seconde, la valeur du compteur est envoyée à un appareil de collecte de données et le compteur est remis à zéro. Ainsi, seconde après seconde, le nombre de gouttes d'eau qui sont tombées (c'est-à-dire la fréquence des gouttes d'eau) est envoyé à la station météo. Il s'agit d'une variable aléatoire Y, que l'on peut simuler par un algorithme de comptage :
III/ Loi de Poisson
La variable aléatoire Y du paragraphe précédent suit une loi de Poisson de paramètre λ. Cette loi a été découverte par Siméon Denis Poisson au milieu du XIXe siècle, comme cas limite d'une loi binomiale lorsque n est grand et p est suffisamment petit pour que λ=n×p ne soit pas trop grand. Poisson a alors montré que la loi suivie par Y est P(Y=k)=e-λ×λk/k!. On peut le vérifier en comparant le diagramme en bâtons des fréquences ci-dessus, avec celui des probabilités théoriques ci-dessous:
On peut superposer les deux diagrammes en bâtons pour comparaison, en ajoutant simplement diagrammeBatonsTheorique 2, 1, probas
(ainsi que la création de tableau probas
) au script précédent.
La pluie s'est intensifiée, ce qui s'est manifesté par une augmentation du paramètre λ. En remplaçant
5 par une valeur plus grande (quelques dizaines de gouttes de pluie par seconde; essayer par exemple λ=20 et les probabilités jusqu'à 100, avec
un second paramètre égal à 4 pour la fonction diagrammeBatonsTheorique
) pour λ, on constate
que le diagramme en bâtons prend une forme de courbe en cloche. Ce qui veut dire que le bruit d'une
averse est modélisé par un bruit blanc gaussien (variables aléatoires normales statistiquement
indépendantes). Mais ceci est une autre histoire...
IV/ Algorithme de Knuth pour simuler une variable aléatoire de Poisson
Pleuvait-il lorsque Donald Knuth a eu cette idée pour simuler rapidement une variable aléatoire de Poisson ? Voici un méta-algorithme:
- L'algorithme ci-dessus revient à additionner des variables exponentielles de paramètre λ jusqu'à ce que leur somme dépasse 1.
- Il revient donc à additionner des expressions du type -ln(x)/λ (où x est uniforme sur ]0;1[) jusqu'à ce que leur somme dépasse 1
- On aura donc le même effet si on additionne des expressions du type ln(x) jusqu'à ce que leur somme passe en-dessous de -λ
- ... ou en multipliant leurs exponentielles x jusqu'à ce que leur produit passe en-dessous de e-λ
C'est l'algorithme de Knuth pour simuler une variable aléatoire de Poisson de paramètre λ :
Cet algorithme est très rapide sur une machine qui effectue rapidement les multiplications de réels. Et encore plus rapide lorsque λ est petit.
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