Conte mathématique 2 : Le problème de Monsieur Tétia

jeudi 25 août 2011
par  Nathalie AH-PINE , Nathalie ROZÉ

Compte rendu d’un atelier de contes mathématiques écrits par une classe de sixième du collège Henri-Matisse à Saint-Pierre de la Réunion.

 Écriture de contes mathématiques
 Conte mathématique 1 : Jacqueline et les deux pots
 Conte mathématique 2 : Le problème de M. Tétia
 Conte mathématique 3 : Zaphir et les cerises de café


« Dan tan lontan », dans le petit village fleuri de l’Entre-Deux, vivait dans une petite case créole aux bardeaux et aux lambrequins, un bardottier qui se nommait M. Tétia. Il savait fabriquer des petites planches de bois appelées des bardeaux qui servaient à habiller les façades et les toits des maisons. Il était le seul du village à posséder ce savoir-faire.

M. Tétia était aussi très gourmand et savait très bien cuisiner le civet de canard. Son petit-fils, Petit Guy, adorait sa cuisine et venait souvent le voir. Bien des fois, il partait avec son grand-père en forêt et passait beaucoup de temps à observer celui qui voulait lui transmettre son savoir-faire. Son grand-père savait choisir, couper et débiter les plus beaux letchis, gréviléas et margosiers.

Chaque jour, pour se rendre dans la forêt, M. Tétia devait traverser la rivière Sassa et pour cela, il avait une toute petite barque. La seule du village.

Un jour, tôt le matin, Petit Guy arriva chez son grand-père. Déjà une bonne odeur de civet de canard parfumait la maison.

« Hum ! Je vais me régaler ce midi, » dit-il.

Son grand-père était en train de préparer ses outils : sa scie de long et sa hache quand soudain, au moment où il leva la tête, il vit Grand-Mère Kalle appuyée à sa fenêtre. Il sentit la peur l’envahir car il connaissait sa légende : elle dévorait les enfants.

Grand-Mère Kalle lui demanda :

« Peux-tu m’aider à traverser la rivière Sassa car je n’ai plus de poudre magique pour faire fonctionner mon balai ? »

M. Tétia pensa :

« Je dois faire traverser la rivière à Grand-Mère Kalle mais aussi à Petit Guy, sans oublier aussi mon civet de canard. Mais Je n’ai qu’une barque qui ne peut contenir qu’une personne et un objet ou au plus deux personnes. De plus, si je laisse Grand-Mère Kalle avec Petit Guy, elle le dévorera et si je laisse mon petit-fils avec mon civet de canard, il l’engloutira. Alors comment vais-je faire ? »

Il savait très bien qu’il n’avait pas le pouvoir de refuser et demanda à la sorcière de patienter tranquillement dehors. Le vieil homme savait également qu’il ne trouverait pas, seul, la solution, alors il partit chercher de l’aide. La « gramoune » du village, celle qui passait son temps à cueillir du choca dans la montagne, pourrait l’aider.

Avec Petit Guy, ils commencèrent leur escalade. Peu de temps après, M. Tétia entendit le fouquet de Grand-mère Kalle qui les suivait, faire « tououout tououout tououout », il comprit que la gramoune était dans les parages. Il la vit et dit :

« Excusez-moi de vous déranger dans votre cueillette, mais j’ai un problème. Pouvez-vous m’aider ? »

La gramoune lui répondit :

« Quel est ton problème ?

– Je dois faire traverser la rivière à Petit Guy et à Grand-Mère Kalle, sans oublier mon civet de canard. Mais si je laisse Grand-Mère Kalle avec mon petit-enfant, elle le mangera et si je laisse le civet de canard avec Petit-Guy, il l’avalera. De plus, dans ma barque, je ne peux transporter que deux personnes ou une personne et un objet. Alors quelle personne dois-je faire traverser en premier ? »

Elle réfléchit quelques minutes puis annonça :

« La personne que tu dois faire traverser en premier est celle à qui tu dois transmettre ton savoir-faire. Je dois finir ma cueillette, alors au revoir. »

Cet indice n’était pas suffisant pour M. Tétia, alors il continua à chercher de l’aide. Il savait que le marabout qui habitait au sommet du Dimitile pourrait l’aider. Il grimpa de nombreuses heures puis il vit un tipi.

« Marabout, Marabout, peux-tu m’aider, j’ai un problème », cria M. Tétia.

Le marabout sortit de son tipi et hurla :

« Qu’est-ce que tu veux, pourquoi me déranges-tu ?

– Je dois faire traverser la rivière à Grand-Mère Kalle et à mon petit-fils Petit Guy, sans oublier mon civet de canard. Mais si je dépose la sorcière à côté de Petit Guy, elle le mangera et si je laisse Petit Guy avec mon civet de canard, il l’avalera. Je sais que mon petit-fils doit traverser en premier mais qui sera le prochain ? »

Le marabout lui dit :

« Les esprits pourront peut-être te donner un indice. Patiente un peu. »

Le sorcier dessina un cercle au sol et alluma à côté de lui un petit feu. Pour appeler les âmes, il s’enfuma et commença sa danse maléfique. Il finit par annoncer :

« J’ai un indice à te donner. La personne qui doit traverser la rivière en deuxième est celle qui sème la terreur dans le village.

– Je sais, c’est Grand-Mère Kalle, mais si je la laisse avec mon petit-fils, il va mourir !

– Débrouille-toi ! »

Le vieil homme n’avait pas complètement encore résolu son problème. Alors, il partit voir son ami tisaneur qui, lui, réfléchissait toujours avant d’agir.

« Mon ami, aide-moi, j’ai un problème. »

Il lui exposa et ajouta :

« J’ai compris que je dois faire traverser Petit Guy en premier et Grand-Mère Kalle en deuxième. Mais si grand-mère Kalle reste avec mon petit-fils, elle le dévorera, alors comment dois-je faire ?

– Mon ami, sache que toute personne qui traverse la rivière doit revenir au village, à l’exception de Grand-Mère Kalle. »

M. Tétia finit par comprendre. Ils firent demi-tour et repartirent chez le vieil homme. Une fois chez lui, il prit son civet de canard et demanda à tous de le suivre. Une fois arrivés au bord de la rivière, le bardottier demanda à Petit Guy d’embarquer, le fit traverser puis le déposa de l’autre côté. De retour, ce fut le tour de Grand-Mère Kalle. Une fois de l’autre côté, la sorcière voulut manger l’enfant mais celui-ci, averti, était déjà remonté dans la barque de son grand-père. Furieuse, elle partit sans même remercier M. Tétia. De toutes les façons, elle était pressée de refaire voler son balai. Pour finir, M. Tétia fit à nouveau traverser la rivière à Petit Guy. Débarqués, il prit son civet de canard et lui fit traverser la rivière. Enfin, il partit rechercher Petit Guy et ils pique-niquèrent dans la forêt en toute quiétude.

Plusieurs années après, M. Tétia prit sa retraite et son petit-fils le remplaça. Petit Guy devint un grand bardottier.

FIN

Conte mathématique écrit par René-Claude, Kenny, Franck, Amélie, Florian, Romain, Manuella et Aucéane.


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