Présentation du projet remédiation 6e

samedi 5 février 2011
par  Marie-Adeline BONNET

Présentation du projet de remédiation en classe de 6e à l’aide du jeu d’échecs (compte rendu de la présentation faire au séminaire IREM du 15 décembre 2010).

Classes concernées : élèves de 6e en grandes difficultés (moins de 50% de réussite aux évaluations nationales de CM2), avec un effectif d’une vingtaine.

Lieux : mise en place dans trois collèges de l’académie, par des enseignants de mathématiques ou d’autres disciplines, à l’initiative de M. Janvier, IA-IPR de mathématiques et de Mme Vérité, principale de collège à Saint-Louis.

Collèges concernés : collège Quartier-Français à Sainte-Suzanne, collège Le Gall à Saint-Louis, collège Plateau-Goyaves à Saint-Louis.

Intervenants extérieurs :
 M. Escaffe Stéphane, arbitre international et membre de la Ligue réunionnaise de jeux d’échecs, intervient une fois par semaine pendant une heure en 6e au collège Quartier-Français.
 M. Balaine Oliver, animateur de la ligue, intervient à Plateau-Goyaves dans le cadre de l’accompagnement éducatif.

Horaires : une heure hebdomadaire durant toute l’année.

Pourquoi un jeu en milieu scolaire ?

Il s’agit d’abord d’un jeu : faire partager sa passion est un privilège. Lorsque celle-ci, par sa richesse, peut aider à l’épanouissement intellectuel de chacun, ce privilège devient un devoir.

En Occident le jeu, quand il n’est pas directement assimilé aux vices, prête à sourire : jouer n’est en aucun cas sérieux.

En Orient, par contre, le jeu rime avec sagesse, le Go est une véritable institution au Japon, il est enseigné dans les écoles, où on y délivre des diplômes de progression. Ce jeu confère une importance sociale à l’individu proportionnellement au niveau acquis.

Dans les républiques slaves, les échecs sont enseignés jusqu’à l’université. Les GMI (Grands Maîtres Internationaux) ont une influence politique considérable. Ainsi, à l’Est le jeu n´est pas comme en Europe synonyme de perte de temps.

Pourtant à l’Ouest, de tout temps, des sociologues se sont penchés sur les bienfaits du jeu pour les tout jeunes enfants. Pauline Kergomard, inspectrice générale des écoles maternelles n’écrivait-elle pas, à la fin du siècle dernier : « Le jeu est le travail de l’enfant » ?

À ce sujet, il peut être utile de lire l’annonce faite par Luc Chatel au sujet d’un plan sciences et technologies à l’École.

Du jeu d’échecs en particulier

Contrairement aux idées reçues, ce jeu n’est pas élitiste et peut s’adresser à des élèves dits « en difficultés ».

Cette pratique encourage, notamment, le développement des capacités intellectuelles telles que la mémoire, le raisonnement logique, l’analyse de problèmes et la mise en œuvre de stratégies de résolution.

Elle contribue également à la construction de la personnalité en encourageant l’attention, l’imagination, l’anticipation, le jugement et la confiance en soi.
Le respect de l’adversaire est également important.

Le jeu d’échecs, école de concentration, favorise le sens de l’effort et la satisfaction intellectuelle. Il peut être le prétexte à un travail interdisciplinaire.

Il n’est pas nécessaire que le travail soit triste pour être fécond. Travailler les échecs est plaisant, jouer aux échecs est plaisant. L’existence de ces îlots d’intérêts et de vie qui tranchent sur la monotonie de l’enseignement quotidien est formidable. En effet, ils apportent des remèdes subtils à certains problèmes d’échecs scolaires : ils donnent aux élèves la possibilité de quitter leur rôle de spectateurs obligés pour devenir acteurs volontaires. Et cela fonctionne car l’élève y trouve du plaisir !

Michel Noir, dans sa thèse en sciences de l’éducation, Le développement des habiletés cognitives de l’enfant par la pratique du jeu d’échecs, écrit :

Les rares observations faites sur ces initiatives attestent que les enfants, après deux années d’apprentissage du jeu d’échecs, ont un niveau de performances plus élevé que celui des enfants de même origine et de même milieu social dans les matières exigeant des compétences mettant en jeu logique, stratégie, mémoire et capacité d’abstraction.

Pour ceux-ci, la nécessité d’un apprentissage s’est concrètement fait sentir : on ne peut jouer aux échecs sans connaître les règles du jeu. Le travail nécessaire à l’acquisition de ces règles n’est plus laborieux dès que l’n est conscient du but recherché. Les élèves ont donc pris conscience de la nécessité de traiter par eux-mêmes l’information qui leur était dispensée afin de construire petit à petit leur propre savoir.

L’immense mérite du jeu d’échecs, c’est qu’il permet de répondre à l’une des préoccupations fondamentales de l’enseignement moderne : donner la possibilité à chaque élève d’avancer à son rythme propre !

Michel Noir écrit :

Pour que le but recherché — l’amélioration des performances scolaires et celle des facultés de stratégie, de mémoire et de concentration — soit atteint, encore faut-il que la méthode d’apprentissage d’échecs soit conçue en fonction de ce développement et qu’elle ne se limite pas à un apprentissage de la seule matière échiquéenne.

Aussi avons-nous tenté très modestement de créer du lien entre les différents domaines d’apprentissage.

Cette pratique met en jeu des compétences transversales du socle commun et du champ de la culture scientifique

Compétence 1 : La maîtrise de la langue française

Systématiquement, durant la première demi-heure, les élèves font des exercices avec un support commun (un échiquier mural) et répondent aux questions posées à l’oral ou en déplaçant des pièces sur l’échiquier. Les élèves s’expriment très volontiers à l’oral.

Durant ou après les parties, ils peuvent-être aussi amenés à communiquer oralement entre eux, à exposer s’ils le souhaitent leurs stratégies, leur enthousiasme et mêmes leurs déceptions. Ils peuvent poser des questions à l’arbitre en cas de litige.

Compétence 6 : Les compétences sociales et civiques (Avoir un comportement responsable)

L’adversaire est la représentation symbolique d’autrui. Ses intentions sont claires, il veut gagner, être « supérieur ». Pour les deux joueurs l’enjeu est le même, et il est important. Respecter son adversaire commence lors de la prise de conscience de cette « symétrie ».

Le joueur se respecte lui-même et respecte son adversaire. Tous deux jouent l’un contre l’autre, mais ensemble.

Le jeu d’échecs contribue donc à l’apprentissage du respect, respect de l’autre, respect de soi-même et respect des normes constitutives d’une société.

Compétence 3 : Les principaux éléments de mathématiques

Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir et bien faisons des mathématiques sans en avoir l’air !

  • Mener à bien un calcul mental
    • On peut leur demander en première séance de compter le nombre de cases noires sur l’échiquier (nous avons obtenu 64:2, 4×8 et bien sûr le résultat à partir d’une somme).
    • Le nombre de premiers coups possibles des noirs ou des blancs.
    • Aux échecs un certain nombre de points est attribué à chaque pièce. Un des exercices consiste alors à faire jouer les élèves pendant cinq minutes et ensuite à leur demander de calculer mentalement le matériel pris à l’adversaire. Cet exercice peut se faire individuellement ou par équipe.
  • Organisation et gestion de données
    • Utiliser des tableaux, des graphiques.
    • Les élèves lisent peut-être plus facilement des tableaux à double entrée, des graphiques et n’ont pas éprouvé de grandes difficultés à utiliser un tableur dont la forme ressemble beaucoup à un échiquier.
  • Compétences en résolution de problèmes
    • Le problème d’échecs s’aborde comme un problème mathématique : analyse des données (les pièces sur l’échiquier, leurs positions, les menaces, protections et combinaisons), énoncé des hypothèses et simulation des coups possibles en déduction, plan logique à suivre...
    • Nul doute que le terme démonstration appartient au domaine mathématique. la résolution même d’un problème d’échecs est une démonstration.
    • « Mat en deux coups » écrit sous un diagramme signifie en réalité : « démontrer que les blancs matent le roi noir en deux coups maximum quelles que soient les réponses noires. » Et la résolution de ce problème respecte les schémas de la démonstration. Les hypothèses étant données par le diagramme, la rédaction commence ainsi : si les blancs jouent tel coup, alors les noirs ont ces n possibilités.
    • Avant de jouer un coup sur l’échiquier, il convient d’avoir acquis la conviction que ce coup était sinon le meilleur, du moins assez bon. Il faut donc avoir déjà analysé les tenants et aboutissants de ce coup. Réfléchir avant d’agir est également nécessaire en mathématiques !
    • La pratique du jeu d´échecs enseigne la nécessité d’une analyse antérieure à l’action. Dans quelque domaine que ce soit, le raisonnement nécessite de savoir ce que l’on veut, de savoir où l’on va.
  • En géométrie
    • Le jeu d’échec oblige l’esprit à effectuer un gros travail de visualisation mentale. Cet aspect du jeu d’échecs permet au moins de se dire qu’il apporte un plus non négligeable, s’il est pratiqué sérieusement, à la résolution d’exercices de géométrie.
  • L’intuition. L’imagination.
    • Aux échecs comme en mathématiques, il arrive que l’on sente confusément quelque chose. « Cela sent Thalès », me disait un élève de 3e. Le joueur d’échecs apprend à maîtriser son intuition. Dans certaines positions l’analyse exhaustive de toutes les variantes est impossible. L’intuition prend alors le relais. « Le sacrifice en f7 devrait marcher. »
    • Aux échecs, c’est l’imagination qui fait la différence entre l’amateur et le maître, sacrifier sa Dame est impensable pour le néophyte. Le maître a la faculté d’imaginer la possibilité qu’un tel coup, apparemment sans avenir, ne soit pas si mauvais.

Quelques réinvestissements en mathématiques

  • À partir du support : « L’enfant et l’échiquier » et « Tracé de maillages ». 
  • À partir de légendes : « La légende de Sissa avec un tableur » et « Conte du roi tout blanc »
  • À partir d’activités proposées en séances échecs : « Activité devinettes » ou encore « Boucle numérique »

Exemples d’activités Transversales

  • Les élèves viennent me rendre compte systématiquement avec beaucoup d’enthousiasme d’activités dans d’autres matières en lien avec le jeu et viennent très volontiers au club d’échecs tous les vendredis. Réinvestissent eux-mêmes (exemple : basket) et progressent.
  • Français, mathématiques et arts plastiques : après avoir lu le conte du roi tout blanc.
  • Histoire des arts : une charade plastique.
  • Histoire-géographie : la carte des clubs à la Réunion.
  • Français : étude d’extraits de l’œuvre de lewis Caroll, « Alice au pays des merveilles ».

Autres projets et perspectives

  • Français : écriture de petits textes décrivant des pièces ou des impressions de jeu.
  • EPS et musique : une partie vivante en costumes et composition musicale.
  • Histoire : frise chronologique en lien avec l’histoire du jeu.
  • Cahier d’échecs, conçu comme un recueil de leurs travaux tout au long de l’année, et tournois.
  • Participation à un tournoi organisé au collège, au championnat académique et à un tournoi en juin au collège le Gall.
  • Ouverture d’une section sportive « échecs ».

Contrat Creative Commons
PRESENTATION DU PROJET DE REMEDIATION 6e by Marie-Adeline Bonnet est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 Unported.


Documents joints

Présentation du projet de remédiation
Diaporama de présentation du projet
Présenté lors du séminaire IREM du 15 décembre 2010

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