Lorsque Muhamad Ibn Musa Al-Khawarizmi a fondé l’algèbre, il comparait les opérations successives destinées à résoudre l’équation du premier degré à l’équilibrage d’une balance par l’une des opérations suivantes :
- al Muqabalah : Enlever (ou ajouter) des masses identiques aux plateaux d’une balance de Roberval [1]
- al gabrah : Faire passer une masse d’un plateau à l’autre de la balance [2]
C’est cette dernière opération qu’on peut visualiser avec un logiciel de géométrie dynamique, le changement de signe ayant lieu au moment où le terme passe à la verticale du signe égal. Il y a quelques années, j’avais utilisé mon Atari ST (nostalgie !) pour faire quelques dessins animés où un oiseau venait de l’azur prendre les termes dans ses serres et les trimbaler d’un membre à l’autre. L’avantage d’une figure manipulée au TBI est qu’on peut synchroniser les mouvements de la souris au discours du prof, bref, aller à la vitesse qu’on veut (ou que les élèves veulent).
Et CaRMetal possède une fonctionnalité très intéressante pour l’algèbre : L’« alias ». Tout objet possède deux noms : Son vrai nom, et un pseudonyme (l’alias) qui peut très bien être le même pour plusieurs objets, et qui peut très bien être une formule LaTeX, un texte dynamique genre « %x(A)% » ou même une combinaison des deux. Par exemple, dans ce diaporama, la première diapo fait porter à chaque segment un nom qui est égal à sa longueur supposée [3].
Si on veut changer un « 2x » en « -2x » la première idée est de donner à un point P1 le pseudonyme « if(x(P1)>0 ;2x ;-2x) » qui s’affiche tel quel au lieu de « fonctionner ». Alors mettre ce texte entre « pourcents » pour qu’il soit interprété par CaRMetal : « %if(x(P1)>0 ;2x ;-2x)% ». Là on a des points d’interrogation qui signifient que ça ne marche toujours pas...
Alors on va vers une figure un peu plus compliquée, chaque terme étant associé à trois points :
- Un point anonyme représenté en clair pour ne pas attirer le regard des élèves, et qui a un double but :
- Le signe de son abscisse détermine quel texte sera affiché
- Le texte suivra ce point, que par la suite on appellera poignée.
- Un point dont l’alias possède un signe « + » et qui suit la poignée.
- Un point dont l’alias aura le signe « - » et qui suit aussi la poignée.
L’astuce est de faire en sorte qu’on ne voie qu’un seul des deux points à la fois, l’un des deux ayant comme attribut « caché » le texte « x(P1)>0 » et l’autre "x(P1)<0", en admettant que la poignée s’appelle P1.
Voici un exemple, où la poignée du terme "8" s’appelle P7 et où la première moitié du texte a pour alias "-8" et se voit lorsque P7 est à droite de l’origine, l’autre moitié (représentée ci-dessous) ayant pour alias "+8" et se voyant, elle, lorsque P7 est à gauche de l’origine.
Voici l’exemple de l’équation 3-2x=8-6x dont les quatre poignées se manipulent à la souris, le passage au-dessus, ou au-dessous, du signe égal devant se faire assez loin pour échapper au magnétisme qui garantit l’alignement horizontal des termes :
Quelques améliorations sont possibles :
- pour faire « frime », le texte « Tilt ! » et une ampoule électrique s’allument lorsque le terme change de signe. Ceci peut distraire les élèves et il peut être souhaitable de les enlever. L’ampoule apparaît lorsque la variable « t » est égale à 1. Or « t » est une disjonction de booléennes égales à 1 lorsque l’une des abscisses des poignées est petite (distance à 0 inférieure à 0,1). En supprimant « t » (avec l’aide de la baguette magique car il est invisible), on supprime une bonne partie de l’ampoule qui dépend de t.
- J’ai fait le choix de garder les couleurs des termes constants lorsqu’ils changent de membre. On peut attirer l’attention sur le changement de signe en faisant dépendre la couleur du signe de l’abscisse de la poignée ; à tester de préférence en classe.
- Bien sûr, on peut aussi faire des fichiers analogues pour les équations-produits, par exemple dans un diaporama CaRMetal où les équations présentées sont en fait les mêmes (une diapo avant développement, statique celle-ci, une diapo comme celle ci-dessus, et une diapo ax=b). Reste à faire le choix entre la division par a et la multiplication par son inverse.
- Constituer une banque d’exercices de ce genre (solution négative ou positive, entière ou fractionnaire, termes entiers, décimaux, fractionnaires ou même radicaux, ...) pourrait être fait par une équipe, pourquoi pas un atelier d’une IREM, pourquoi pas de cette IREM ?
Bonus : L’oiseau
Pour que l’oiseau batte des ailes (polygonales), il faut rajouter aux ordonnées de leurs sommets des termes proportionnels au produit suivant :
sin(1000*x(P1))*sin(1000*y(P1))
où P1 est le nom de la poignée. Dans ce cas l’oiseau ne bat des ailes que si la trajectoire de la poignée ne se fait pas sur une ligne où sin(1000*x(P1)) ne s’annule pas, ni sin(1000*y(P1)). Dans l’exemple ci-dessous, la poignée est le sommet de la crête de l’oiseau (plume médiane) :
Par contre pour que l’oiseau puisse attraper puis lâcher des termes, il faut un magnétisme conditionnel, ce qui est nettement moins facile à implémenter...
Pour savoir si le fait de rendre tellement visuelle la résolution des équations présente un intérêt pédagogique, il n’y a qu’un moyen : Tester en classe...
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