L’école marron, c’est marrant !

dimanche 11 juillet 2021
par  Alain BUSSER

L’école marron permet de faire des mathématiques tout en bougeant dans un cadre naturel aménagé pour les mathématiques :

Un nomogramme a été gravé au laser, par Alain Busser et Ariel Freckhaus, pour le livrer à Grand-Coude :

C’est à l’occasion de la livraison de ce nomogramme, que des élèves de l’Alefpa, accompagnés par leur enseignant Charles Gamblin et leur éducateur spécialisé Ludovic Despujol, sont montés à Grand-Coude et ont pu tester l’activité décrite ci-dessous, praticable en cycle 2.

Après avoir expliqué le concept d’école marron [1], Ibrahim Moullan a proposé une visite du verger des agrumes :

Puis il a affecté chaque équipe à un citronnier

et la tâche confiée à l’équipe était simple :

  • dire combien il y a de citrons sur le citronnier
  • expliquer la stratégie mise en œuvre pour répondre à la question précédente.

Les équipes étaient chargées d’organiser elles-mêmes le partage du travail.

Phase 1

Au début, chaque équipe (constituée par consensus entre les élèves) a été affectée à un citronnier.

équipe 1

Assis devant le citronnier, les élèves discutent sur une stratégie de comptage

La phase écrite commence dès le début

Puis le décompte commence :

Avec concentration :

équipe 2

La seconde équipe a opté pour un partage du travail : compter par branche puis additionner les résultats :

Le décompte est fait avec le même soin que l’équipe 1 :

Phase 2

Ensuite, les équipes ont échangé leur place afin de comparer ultérieurement leurs résultats.

équipe 1

Après avoir changé de citronnier, l’équipe 1 a d’abord peaufiné la rédaction des résultats précédents :

Là encore, beaucoup de concentration :

équipe 2

Tout de suite dans l’action :

mais avec un usage croissant de l’écrit :

un travail collaboratif

et toujours de la concentration

Synthèse

Ensuite, avant de recommencer l’activité avec un matériel (pastilles à coller), les élèves se sont retrouvés pour voir si les deux équipes ont trouvé le même résultat pour un citronnier donné.

Rapports

100 citrons sur le citronnier 1, 150 sur le citronnier 2

98 citrons sur le citronnier 1, 153 (mal écrit, il s’agit bien de 153) sur le citronnier 2

100 citrons sur le citronnier 1, 150 sur le citronnier 2 (on voit le détail des calculs)

La variable aléatoire des citrons

En supposant

  • que, pour chaque citron, la probabilité de ne pas le voir (et donc, ne pas le compter) est p (un nombre petit)
  • que, pour chaque citron, la probabilité de le compter deux fois est q (un autre nombre petit)
  • qu’il y a indépendance entre les citrons [2],

alors le nombre de citrons effectivement comptés dans un citronnier de n citrons est une variable aléatoire, de paramètres (n,p,q) et que l’on propose d’appeler variable aléatoire des citrons. Pour calculer sa loi, Laplace propose une méthode basée sur le calcul formel : on développe l’expression (p+(1-p-q)t+qt²)n et on regarde le coefficient de tk pour avoir la probabilité de compter k citrons. Pour chaque citron, on a cette loi :

k P(X=k)
0 p
1 1-p-q
2 q

Donc une espérance égale à 0×p+1×(1-p-q)+2×q=1-p+q et une variance égale à p+q-(p-q)². Donc l’espérance de la loi des citrons est n(1-p+q) et sa variance est n(p+q-(p-q)²). La loi des citrons peut être approchée par une loi normale ayant ces deux paramètres. Pour simuler cette variable aléatoire, on peut faire ainsi en Python :

Voici le diagramme en bâton de 1000 réalisations de la variable aléatoire des citrons de paramètres 99, 0.02 et 0.01 :

Ceci est cohérent avec le résultat de 98 citrons trouvé par une équipe, l’autre résultat de 100 citrons pouvant s’expliquer en partie par un « biais des chiffres ronds ».

Une modélisation plus simple est celle d’une loi de Poisson. D’après son calculateur en ligne, si son paramètre λ est proche de 100, la probabilité de compter juste est environ 0,04 soit une chance sur 25 :

Voici le récit de la journée par les élèves eux-mêmes, mais ils ont oublié de dire qu’ils ont trouvé délicieux les citrons qui leur ont été offerts à la fin :

article par les élèves de l’Alefpa
Le récit de la journée, vu du côté élèves
UEE 2021

Les élèves expriment leur désir de retourner à l’école marron. L’activité a été créée spécialement pour eux, et l’école marron fait preuve d’une grande adaptabilité au public visiteur. Le site illustre bien les mesures suivantes du rapport Villani-Torossian :

  • 2 : mathématiques prioritaires en CP et CE1 en Rep+
  • 3 : expérimentation à grande échelle
  • 4 : équipement permettant aux élèves de manipuler des objets réels
  • 5 : manipulation-verbalisation-abstraction
  • 7 : périscolaire
  • 8 : échanges avec les autres disciplines
  • 9 : réconciliation
  • 11 : sens des nombres et des opérations
  • 12 : calculs mental et intelligent
  • 15 : développement professionnel en équipe
  • 19 : égalité femmes-hommes
  • 21 : portail de ressources

soit 12 mesures sur 21. Des sorties scolaires à Grand-Coude sont donc bénéfiques pour toutes les classes dont plusieurs enseignants (maths, histoire, biologie, EPS,...) accompagnent les élèves, prioritairement en Rep+, et comme on le voit, même dans le premier degré. La réconciliation avec les mathématiques évoquée dans la mesure 9 du rapport Villani-Torossian ne concerne d’ailleurs pas que les élèves, elle peut aussi intéresser leurs enseignants ;-)


[1Il ne s’agit pas de l’école buissonnière, mais de l’école sous les arbres, ancêtre local de l’école ouverte pendant les vacances. On peut oser une comparaison avec les centres dits aérés, à ceci près que Grand-Coude est vraiment très aéré, et que les activités y sont essentiellement centrées sur le patrimoine, les mathématiques et la biodiversité.

[2Hypothèse simplificatrice, qui ne tient pas compte, par exemple, de ce qu’un citron peut en cacher un autre.


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