Journal de bord d'une confinée

Je n'ai pas envie de dire comme tout le monde ce qu'on ne cesse de répéter ces temps-ci. Respectez les gestes barrières, restez chez vous, évitez les contacts, coronavirus, covid-19,... On a plus que ces mots à la bouche ! Non, moi je suis à la recherche d'autre chose, de quelque chose de différent...


Nous vivons actuellement dans un monde où l'économie dégringole, où les gens se piétinent les uns les autres, où les chefs d'état pour une contrariété construisent des murs entiers ! En ce moment les hôpitaux sont débordés, pas assez de moyens donc des morts... A la télé chaque soir, on nous annonce de nouveaux cas, de nouvelles morts... Les entreprises s'efforcent de fabriquer en masse des gels hydroalcoolique ou des masques. Mais à qui la priorité ? Aux plus exposés ? ou aux plus riches ? Dans quelques temps, vous verrez il faudra payer l'air pour respirer, et là nous autres on aura plus qu'à crever. Alors oui, mes mots sont crus mais c'est la réalité qui nous attend tous et qui est déjà la vie quotidienne de certains. Si on ne fait rien, que l'on continue à agir de cette manière-là... l'espèce humaine se mène elle-même à sa perte mais dans sa chute elle entraîne avec elle des milliards et des milliards d'espèces de faunes, de flores, des écosystèmes entiers ! Une planète ! C'est ce que nous sommes en train d’entraîner dans notre chute. Alors je ne vais pas faire la morale comme on l'a faite depuis des siècles et parce que lycéenne que je suis : qui suis-je pour prétendre avoir le dernier mot ? Non l'idée est seulement de prendre conscience de certaines choses.

Tout ce confort qui est le notre au quotidien est-il réellement nécessaire, indispensable ? Beaucoup de gens affirment que ce confinement leur permet de "revenir à l'essentiel" mais nous sommes ici sur le plan matériel. Au fil des jours je suis persuadée que l'on va tous prendre conscience que "revenir à l'essentiel" ne concerne pas le matériel mais les relations humaines. N'est-ce pas cela qui nous est si indispensable et que l'on cherche à combler lorsqu'on en manque par la mise en scène d'un confort qui en fait est maladif ? Vous avez le temps en ce moment. Vous ne pouvez me dire le contraire, habituellement on se plaint toujours de manquer de temps, de courir après notre montre, ect. Alors maintenant, mettez-vous à la fenêtre et observez. Ho regardez ! Un moineau ! Cet oiseau tiens dans son bec (non pas un fromage comme le dit si bien la Fontaine) mais une brindille. Oui une simple brindille. Rien de bien passionnant pour certains. Mais si vous reconsidériez cette brindille vous verriez que cet oiseau, tout oiseau qu'il est ne prends que ce dont il a besoin. Et en plus de ne prendre que le nécessaire à la construction de son nid, il se sert en plus de matériaux que nous pourrions qualifier selon la logique humaine d'"usagés" ! Et oui cet oiseau ne va pas aller chercher une brindille "de qualité" ! Pour lui la brindille est un cadeau et non pas une chose à posséder. Nous voilà donc face à un moineau qui par sa simplicité nous montre que le bonheur ne réside pas dans la possession. Cet oiseau est à la fois respectueux de son environnement, ne prenant que le nécessaire, écologique et il le vit très bien ! Peut-être que si nous adoptions un peu plus le mode de vie de cet oiseau, on pourrait voir le changement... Qui sait ?

Avec l'hiver qui arrive, les fourmis rentrent dans ce que nous appelons « notre maison ». (Bien qu'ici le terme de « notre » qui indique une certaine possessivité soit complètement erroné puisque rien ne nous appartient réellement, de même que « maison » n'est autre qu'un bloque de ciment et d’agglos planté sur un ancien espace vert... Mais ne tergiversons pas. Dans ce journal de bord je vais tacher de conserver les mots que nous employons au quotidien bien que l'on pourrait s'interroger sur la signification de ces derniers...) Les fourmis donc, « envahissent » la maison, j'ai vu mon père les noyer. Je ne réprimande ni ne blâme qui que ce soit bien que je trouve cela injuste. C'est si facile de noyer des fourmis... Pensez-vous que l'humanité serait aussi facile à noyer avec la fonte des glaces ? « Tel est pris qui croyait prendre ! » Prisonniers de son propre piège. Pourtant les fourmis sont absolument fascinantes ! Nous devrions sans doute prendre exemple sur ces dernières. Leur esprit d'entraide, leur maniabilité, la confiance qu'elles ont les unes en les autres... Franchement, où allons nous ? Droit dans le mur. J'aimerai à présent vous parler des papillons. Certains en ont peur, d'autres sont émerveillés,... On a tous une réaction différente face à eux. Moi, ils m'émeuvent. Ils semblent si fragiles... Et pourtant si beaux ! Seulement aujourd'hui plus personne ne les voit... Ils sont comme les étoiles. Trop de pollution lumineuse... Trop de pollution tout court. Alors aujourd'hui, voilà ce que j'ai envie de dire...


«Je cours. Je cours après la montre, je cours après le temps. Il va si vite ! Impossible de l'arrêter. Je cours après le confort, je cours après des rêves oubliés. Obnubilée par ces écrans qui ont remplacés nos yeux. Je cours derrière ma vie. Je cours à ma poursuite. Oui, je cours. Pourquoi ? Je l'ai oublié. Je cours à la recherche de qui, de quoi ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Vais-je pouvoir un jour m'arrêter ? Voilà ma vie. Naître, courir. Grandir, courir. Mourir, courir. Où est le frein ? La clé qui me permettra de stopper cette course effrénée ?

-Être confiné. C'est tout ce qu'on peut vous proposer. Navré mais nous n'avons plus que ça.»

Alors je suis restée, enfermée. Longtemps. Assez longtemps pour prendre le temps. Réfléchir penser rêver. Depuis sa fenêtre on apprends à nouveau à contempler. A ma fenêtre, je me suis penchée sur une toile d'araignée encore toute mouillée de rosée et j'y ai vu des étoiles. Une famille d'étoile déposée avec douceur sur une toile d'araignée. Nous sommes ces météores, joyaux du dehors. Seulement nous n'en avons pas encore tous conscience. Famille, réunie au creux de la voie lactée. Ensemble. Nous sommes un tout. Une seule et même espèce. « Retrouves toi en l'autre car l'autre est un autre toi. » Dans ce cas je suis une araignée. Un de ces petits êtres hypersensibles qui effraient tant. Est-ce que moi aussi avec mon hypersensibilité j'effraie ? Mais je suis également un poisson-ballon vous savez ces drôles de poissons qui se « gonflent » pour éloigner les prédateurs mais une fois gonflés, les voilà qui se mettent à tourner sur eux-même n'arrivant pas à retrouver leur orientation. Ce poisson-ballon illustre ce que j'appelle un « mirage de défense » qui consiste à se montrer plus imposant que l'on ne l'est vraiment. Je poursuivrais en vous disant que je suis une girafe. Les pieds sur terre et la tête dans les étoiles ! C'est un bon compromis non ? Je suis un chêne. Image ancestrale et sage, vieux de cent ans, paisible et inspirant. Je suis un coquelicot, égaré dans un champ. Point rouge flamboyant à la fois fragile et fripé. Voilà tout ce que, non pas je suis, mais nous sommes. Voilà cette famille d'étoile. Ce n'est pas ce que nous appelons l'humanité, c'est la vie. Toute entière. Dansante, chantante, vibrante. C'est la vie, c'est ma vie, c'est notre vie. En soit cette vie là ne nous appartient pas, nous l'empruntons, seulement pour un temps. Quand nous fêtons une naissance, nous ne célébrons pas la vie mais le début d'une future mort. Le chronomètre est lancé, le décompte commence. Un à un les grains de sables glissent dans le sablier comme les premières dents de lait. Ça y est, tu grandis. On ne dit pas vieillir, pour ne pas t'effrayer, vieillir ça rapproche plus de la mort que grandir. Premiers sourires, premiers rires, ton premier. C'est lui, c'est elle. La rupture te déchires. Mais il faut avancer, tu rebondis comme chaque fois et tu te dis : c'est que ça devait se faire. Alors te voilà qui erre entre boulot, famille et amis un peu perdu dans ce chaos. Les rides s’accumulent sur ton visage fatigué. Le dernier grain de sable vient de couler et le sablier s'est brisé. Dernier souffle et pas le temps de dire ouf. Qu'aurais-je fait dans cette vie effrénée ? La mort est venu te faucher mais en soit elle n'est pas triste, ce n'est qu'une suite et non une fin. Je suis en deuil. Je suis en deuil du monde, notre foyer d’accueil. Et vous ?

Et après ?

Un papillon. Magnifique.
Dans un battement d'ailes coloré
Il s'est envolé.
Tandis que les soignants s'affairaient
Autour d'un nouvel infecté
Le voilà qui se pose
Sur cette personne à réanimer
Et qui avec courage, ose
A l'oreille lui murmurer
«La clé est en toi.
Retrouves cette forêt
Celle que tu as tant aimé
Lieu sacré où rien ne pouvait t'arriver
Nid douillet
Que tu détruit à cet instant précis.
Retrouves cette source claire
Qui se trouve à présent polluée
Retrouves ce ciel, égaré, déréglé
Qui ne sait plus où aller
Retrouves ces insectes
Retrouves ces animaux
Retrouves ces plantes
Retrouves cette planète
Et retrouves toi.
Fais le point sur tes réelles nécessités
Ce luxe, ce confort que tu vois
Est-ce si indispensable ?
Prends le temps de regarder
Apprends, réapprends à savourer
A toucher, à écouter, à aimer.
C'est à toi de choisir aujourd'hui, tu as toutes les clés
Mais s'il te plaît ne m'emporte pas dans ta chute
La clé est en toi.»

Qui que nous soyons, où que nous soyons. Une seule et même nation, pour un monde sans inégalités ni rivalités. Aimons.

 

J'espère que ma voix saura être écoutée...

Zoé Cugny 2nde 4